Une histoire de clichés


Auteur : Hito
E-mail : h_hito76@yahoo.fr
Résumé: Carter s'offre des vacances.
Genre: Guimauve S/J
Spoilers: Saison 4 ou 5
Disclaimer : Les personnages et l’univers ne sont pas à moi mais à la MGM…

NB/Merci à Hermaline et Nemesis pour leur relecture.

Pour la petite histoire, toutes les descriptions sont véridiques puisqu'il s'agit d'un lieu dans lequel je suis allée il y a deux ans ^^ C'était le paradis ^^ J'ai pris quelques photos que vous trouverez dans la fic. ;-)

 

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D’un geste vif, Sam tira le rideau unique de la porte fenêtre, cligna des yeux quelques secondes sous la luminosité du jour puis soupira d’aise. Devant elle se déployait une mer turquoise dont la surface était à peine troublée par une brise légère. Le ciel laissait présager une journée magnifique et lorsque la jeune femme sortit sur la terrasse, ses derniers doutes s’envolèrent.

Quelques jours auparavant, Daniel avait reçu un courrier de Sarah lui vantant les bienfaits du soleil de Grèce. Elle avait joint à sa lettre une brochure mais le jeune homme l’avait rapidement dédaignée, trop excité par la découverte archéologique que SG9 venait de faire sur P3Z556. Sam, présente dans le bureau de son ami ce jour-là, était restée plusieurs secondes hypnotisée par le prospectus en papier glacé. Peut-être était-ce le bleu particulièrement soutenu du ciel qui avait retenu son attention. Ce bleu presque électrique et totalement déplacé dans ce bureau aux murs tristement gris.

Une minute plus tard, le nez dans la brochure, sa décision était prise.

Sa demande de prendre une semaine supplémentaire à celle déjà accordée à SG1 pour ce mois d’Août avait bien évidement pris tout le monde par surprise, mais qui aurait pu refuser des jours de congés à Samantha Carter ? Hammond les lui avait accordés sans hésiter un seul instant et, tandis que le reste de son équipe restait enfermé à Cheyenne Mountain, elle était là, le nez levé vers un ciel sans nuages.

Elle était arrivée la veille en fin d’après-midi après avoir loué une voiture à l’aéroport et conduit près d’une heure et demi sous un soleil éclatant. L’accueil avait été chaleureux et sa première impression excellente.
L’hôtel se trouvait un peu à l’écart de la ville, et comportait de très nombreux bungalows avec vue sur la mer. La végétation y était luxuriante, donnant une agréable impression d’isolement et pourtant tout était à proximité. Tennis, restaurants, piscine, mini golf et plage. Le tout appartenant à l’hôtel et exclusivement réservé à sa clientèle.

Une fois la clef de sa chambre en main, elle avait suivi le plan qu’on lui avait donné à la réception et s’était dirigée vers son bungalow. La vue de sa chambre était imprenable et dès que ses bagages furent posés près de son double-lit, elle s’était empressée d’appeler la base. Elle était aussitôt tombée sur Daniel qui travaillait avec Teal’c sur les fresques trouvées par SG9. Le Colonel, quant à lui, était parti en excursion dans les couloirs du SGC et à coup sûr « allait être très déçu d’avoir manqué son appel ».

Dans un soupir, Sam chassa ses pensées qui la ramenaient inlassablement vers Cheyenne Mountain. Cela faisait si longtemps qu’elle n’avait pas pris de vacances. Si longtemps qu’elle ne s’était pas éloignée de la base plus de deux jours. Cette coupure allait lui faire le plus grand bien.

Son ventre se rappela bruyamment à elle. La veille au soir, elle n’avait pas eu le courage d’aller au restaurant et s’était effondrée sur son lit. A présent, elle avait une faim de loup ! Elle s’empressa donc de prendre une douche et, une fois habillée, partit rejoindre le restaurant accueillant les demi-pensionnaires de l’hôtel.

Son regard affamé glissa sur le buffet contenant fruits, légumes, charcuterie et omelette. Un peu plus loin, des viennoiseries appétissantes attendaient qu’on vienne les déguster. Sam chargea son assiette sans remords et s’attabla à l’extérieur, face à la mer. Malgré l’heure matinale, le restaurant était plein. Beaucoup de couples et de familles se relayaient autour du buffet. Elle laissa son regard errer sur la salle et une sensation désagréable mais familière la saisit.

Elle devait être la seule célibataire de l’hôtel et cela attirait l’attention. Elle sentait parfaitement les oeillades curieuses et parfois désolées des clients et son malaise s’accentua. Dans un soupir agacé, Sam choisit de les ignorer et se tourna résolument vers la mer. A partir de ce soir, elle prendrait un livre avec elle.

 

 

*****************
                       

Sam posa son sac de toile à ses pieds et sourit. L’une des petites plages privées de l’hôtel était quasiment déserte et elle s’installa sur une chaise longue avec délectation. Ici, pas de hurlements d’enfants, pas de plage surpeuplée, elle était seule. Enfin… hormis le nageur solitaire qui batifolait dans l’eau, un masque sur le nez et un tuba dans la bouche.

Sortant de son sac un livre d’une épaisseur plus que conséquente, Sam songea, non sans un sourire, que le Colonel serait fière d’elle s’il la voyait dédaigner son ordinateur portable pour un roman. Ses lunettes de soleil sur le nez, elle redressa légèrement le dossier de sa chaise et commença à lire. Il ne s’était écoulé qu’une petite demi-heure lorsque son téléphone se mit à sonner. Dans un soupir, elle plongea la main dans son sac et regarda le nom affiché sur le petit écran du portable.

« O’Neill »

Un sourire étira aussitôt ses lèvres et elle s’empressa d’accepter l’appel. Dans sa hâte, son livre tomba sur les galets mais elle n’y prêta aucune attention.

- Pitié, dites-moi qu’il pleut ! entendit-elle aussitôt lorsqu’elle eut décroché.

Le sourire de la jeune femme s’élargit et elle leva un regard brillant vers le large.

- La mer est turquoise, il n’y a pas un seul nuage dans le ciel et une brise légère rafraîchit l’air.
- Je vous déteste ! répondit Jack d’un ton niant totalement cette affirmation.

Sam rit doucement, à peine surprise de voir son cœur battre soudain si vite.

- Vous avez surpris tout le monde, reprit-il au bout d’un instant.
- Je me suis surprise moi-même.
- Je suis content que vous vous reposiez.

Sa voix était douce et Sam soupira silencieusement.

- J’ai quand même pris mon PC portable ! parvint-elle à articuler gaiement.
- Mais vous ne l’avez pas encore allumé.

Cette remarque étant davantage une affirmation qu’une demande, la jeune femme haussa les sourcils, suspicieuse.

- Comment le savez-vous ?
- Parce que vous auriez remarqué qu’il ne marchait pas. J’ai enlevé le disque dur.
-
… Quoi ? bredouilla-t-elle avant de caler le téléphone entre son oreille et son épaule afin de plonger les mains dans son sac.

Elle l’entendit sourire à l’autre bout du fil à l’instant où elle posait le portable sur ses jambes nues.  Elle retourna l’ordinateur et découvrit un vide béant à l’endroit où aurait dû se trouver le disque dur.

- Comment… ? marmonna-t-elle, cherchant dans ses souvenirs l’instant précis où le vol avait pu avoir lieu.
- Eh eh ! Comme ça, je suis sûr que vous vous reposerez !
-
Je vous déteste, lâcha-t-elle boudeuse en rangeant l’ordinateur à présent inutile dans son sac.
- Je sais !

Partagée entre l’agacement d’avoir été ainsi leurrée et le plaisir d’être au téléphone avec son supérieur, Sam chercha fébrilement une idée capable de le retenir un peu plus longtemps et un moyen quelconque de prendre sa revanche. Le silence commençant à durer, elle jeta un regard désespéré autour d’elle et fut attirée par l’exclamation d’un homme, quelques dizaines de mètres plus loin. Elle se redressa aussitôt.

- Vous savez ce que j’ai sous les yeux ?

Jack hésita, parfaitement conscient de la note de triomphe contenue dans la voix de la jeune femme :

- Dites toujours…
-
Un homme qui vient de pêcher un poisson plus gros que l’artefact trouvé sur P2X355.
- …Vous me faites marcher.

Pour seule réponse, Sam tendit le téléphone en direction de l’heureux pêcheur. Les exclamations émerveillées de ce dernier étaient suffisamment puissantes pour parvenir jusqu’à Jack et lorsque la jeune femme mit de nouveau l’appareil contre son oreille, un sourire vainqueur barrait son visage.

- Alors ?
- Je vous déteste !
-
… Je sais.

Un nouveau silence se fit, rapidement brisé cette fois-ci.

- Et dire que je suis bloqué au SGC, se lamenta Jack, dans un soupir à fendre l’âme.
- Rien ne vous empêche de prendre quelques jours en plus de la semaine prochaine. Je suis sûre qu’Hammond accepterait.
- Ils ont besoin d’hommes à la base, grommela-t-il.
- Il a bien accepté que je parte.
- Parce que c’est bien la première fois en sept ans que vous le demandez ! Moi, je le fais tous les jours… Je crois avoir un peu abusé …

Sam rit, visualisant parfaitement le Général Hammond las des suppliques de son subordonné.

- Dommage, finit-elle par répondre en soupirant.

Dommage oui. L’espace d’un instant, elle s’était imaginée dans ce décor paradisiaque avec le Colonel à ses côtés. Bien sûr, c’était impensable. Même s’il venait à prendre quelques jours supplémentaires, jamais il ne viendrait la rejoindre ici.

Il avait dû lire dans ses pensées car il répondit à voix basse.

- Ne me tentez pas.

Le cœur soudain battant, elle se demanda s’ils songeaient ou non à la même chose. Parlait-il de prendre de simples vacances seul de son côté ou de venir la rejoindre en Grèce ?

Après tout, ne l’avait-il pas invitée plusieurs fois à le suivre dans son chalet du Minnesota ?

Un silence se fit sans que Sam trouve le courage de lui poser la moindre question afin de l’éclairer, et finalement la voix grave mais légère de son supérieur retentit dans le creux de son oreille.

- Bien… Profitez du soleil, Carter ! Ici, c’est l’heure d’aller se coucher !
-
Bonne nuit, Mon Colonel, répondit la jeune femme avec une pointe de déception.

La liaison fut coupée et Sam soupira.

Un certain malaise la saisit mais elle rejeta bien vite cette sensation et rangea son téléphone portable à l’intérieur de son sac de plage. Elle n’était certainement pas là pour déprimer.

Jetant un vague coup d’œil vers le large, elle vit l’inconnu se rapprocher de la plage puis sortir prudemment de l’eau. Rajustant ses lunettes de soleil sur son nez, Sam jaugea l’homme à la dérobée et fut amusée par la pâleur extrême de son corps malgré quelques coups de soleil sur les épaules. A le voir ainsi, il n’était pas difficile de constater que lui non plus n’était pas un adepte des vacances.

Une petite quarantaine, les cheveux blonds et un corps relativement bien entretenu, il dégageait une certaine séduction qui d’ordinaire ne l’aurait pas laissée indifférente.  Mais elle était venue ici avant tout pour être seule et ne se sentait guère l’envie de se lier de quelque façon que ce fut. Redressant son livre, la jeune femme remarqua pour la première fois la serviette bleue posée sur l’une des chaises longues et du coin de l’œil vit l’homme s’en approcher.

- Bonjour, dit-il en observant le livre qu’elle tenait entre ses mains.
- Bonjour, répondit-elle.
- Vous êtes américaine ?

La voix de l’inconnu devint plus chaleureuse, voir soulagée, et Sam esquissa un sourire.

- Oui.
- Nous ne sommes pas très nombreux ici. C’est bondé d’italiens, espagnols et français.

Tandis qu’il entreprenait de se sécher rapidement, le regard de l’homme balaya les lieux puis demanda :

- Ne me dites pas que vous êtes seule ?
- Pourquoi ? répliqua-t-elle, aussitôt sur la défensive.
- Cela me semble aberrant…

La jeune femme se retint de rire face à cette technique de drague plus qu’ordinaire mais saisit sa main lorsqu’il la lui tendit.

- Je m’appelle Mike Burns.
- Samantha Carter.
- Samantha… Heureux de faire votre connaissance.

Un sourire étira les lèvres de l’homme, dévoilant une rangée de dents blanches et parfaitement alignées.

- Vous êtes ici pour longtemps ? demanda-t-il.
- Une petite semaine et vous ?
- Pareil. Cela doit faire près de cinq ans que je ne m’étais pas permis quelques jours au soleil et j’avoue que ça me fait le plus grand bien.
- Un accro du travail ? s’enquit-elle d’un air connaisseur.
- J’aime ça, oui. Je possède une petite entreprise informatique qui me prend pas mal de mon temps.
- Petite, vraiment ? demanda-t-elle perspicace.

Il se contenta de lui sourire puis demanda à son tour :

- Et vous ?
- Je suis Docteur en Astrophysique.

Mike haussa les sourcils, impressionné.

- Eh bien… moi qui pensais en jeter avec ma société. Me voilà tout petit, brusquement.

Sam rit doucement et finit par se détendre. L’homme était gentil, pas très subtil mais dans l’art de la séduction, qui l’était vraiment ?

Le visage du Colonel apparut un bref instant dans son esprit mais elle le chassa vivement. Quelques regards ambigus et invitations… amicales ? A ce niveau-là, ce n’était plus être subtil mais carrément abstrait. 

Ils discutèrent de choses et d’autres pendant une partie de la matinée puis Sam prétexta l’envie d’un peu de fraîcheur pour mettre un terme à leur conversation et rejoindre sa chambre. Malgré l’agréable caractère de Mike, elle tenait à sa tranquillité et il acquiesça en souriant, lui faisant cependant promettre une rencontre prochaine.

Lorsqu’elle revint sur la plage vers quinze heures, celle-ci était totalement déserte et Sam s’installa prudemment sous l’un des parasols afin d’éviter les coups de soleil. Un vent constant et plus qu’agréable glissait sur les galets, adoucissait l’air et invitait à une douce somnolence. La jeune femme s’étira paresseusement sur sa chaise.

Pourquoi diable n’avait-elle pas fait cela plus tôt ? Ce voyage était définitivement une excellente idée.

Pendant les heures qui suivirent, Sam fit une courte sieste puis reprit son livre en main, plongeant avec délectation dans La Malerune*.

Quelques éclats de rire intermittents la ramenaient parfois à la réalité, tandis que la plage s’emplissait et se désemplissait. Mais ils n’étaient jamais plus de quatre et Carter trouvait incroyable la tranquillité des lieux.

Son téléphone se mit soudainement à sonner et elle croisa les doigts en espérant qu’aucune urgence ne la rappellerait à la base. Mais lorsqu’elle découvrit « O’Neill » s’affichant sur le petit écran de son portable, Sam esquissa un sourire de plaisir et décrocha aussitôt.

Si elle avait su qu’il lui suffisait de prendre des vacances à l’étranger pour avoir le Colonel « sur le dos »...

- Bien dormi, Mon Colonel ? demanda-t-elle en signe de salut.
- Comme un bébé, mais pas assez… Comment s’est passée votre première journée ?
-
Reposante. Vais-je tenir une semaine à ce rythme-là, telle est la question, plaisanta-t-elle.
- Je vous interdis de remettre les pieds à la base ! s’exclama-t-il aussitôt.
- J’irais me cacher chez moi, alors !
- Je fonce barricader votre porte !

La jeune femme rit de bon cœur et entendit le Colonel sourire à l’autre bout de la ligne. Sam soupira de plaisir.

- Alors ? Quel est votre emploi du temps de la semaine ? s’enquit-il au bout d’un instant de silence.
- Eh bien, je pensais aller visiter un peu les ruines de Mycènes.
- Vous n’en avez pas assez vu avec Daniel ? rétorqua-t-il aussitôt.
- Il s’agit de notre histoire, Mon Colonel.
- Il s’agit surtout de cailloux !
-
Mais de nos cailloux à nous, fit-elle patiemment remarquer, en s’affalant plus confortablement sur sa chaise longue. 

Des pas dans son dos lui parvinrent et Sam tourna légèrement la tête sur le côté.

- Samantha ! Vous venez vous baigner ?

Mike parvint à sa hauteur, un sourire sur les lèvres, mais fit une grimace d’excuse en la découvrant au téléphone.

- Ah, désolé ! chuchota-t-il aussitôt.

Sam lui fit un petit geste amical de la main et il s’éloigna afin de lui laisser un peu d’intimité. La jeune femme reporta donc son attention sur sa conversation téléphonique mais un silence s’était fait à l’autre bout de la ligne.

Le Colonel avait-il entendu ?

- Je vous dérange peut-être ? demanda-t-il enfin, confirmant ses craintes.

La voix était calme, impersonnelle et Sam bredouilla, gênée.

- Pas du tout…
- Vous avez déjà fait des rencontres ?
-
Nous ne sommes pas beaucoup d’américains ici… C’est juste quelqu’un que j’ai rencontré ce matin.
- Je vois. Eh bien je vais vous laisser, dit-il d’un ton enjoué qui sonnait faux à l’oreille de Sam.
- Vous n’êtes pas obligé, Mon Colonel ! s’empressa-t-elle aussitôt de lancer. Comment ça se passe à la base ?

Elle entendit Jack sourire devant cette tentative évidente de le retenir et se détendit.

- Aucune nouvelle des Tok’ra et je m’en réjouis ! SG5 est rentrée cette nuit, tout s’est bien passé.
-
Tant mieux…

Un grondement attira l’attention de Sam et elle leva les yeux vers un Jet Ski qui fendait la mer à vive allure.

- Quelqu’un a décidé de tondre la plage ? demanda le Colonel une fois le calme revenu.

Elle rit.

- Non, il s’agit d’un couple sur un Jet Ski. L’hôtel en loue.
- Raaaah… ça fait des lustres que je n’en ai pas fait…

Sam sentit son cœur battre brusquement plus vite et ses doigts se crispèrent autour de son téléphone.

- Vous êtes sûr que vous ne voulez pas prendre quelques jours de congé en plus de la semaine prochaine ? demanda-t-elle avec une feinte légèreté. Notre ami pêcheur ne sait plus où donner de la tête avec tous ces poissons ! Il aurait besoin qu’un sérieux coup de main !
- Carter ! Vous êtes cruelle, ne me tentez pas !

La jeune femme sentit la sincérité de son hésitation et se mordit violemment la lèvre.

- … Eh bien venez !

Comment avait-elle pu oser une chose pareille ? C’était si culotté, si dénué d’ambiguïté qu’elle se demanda un bref instant si le soleil de Grèce ne lui avait pas tout simplement tapé sur la tête. Un long silence se fit à l’autre bout du fil et elle se prit à regretter ses paroles audacieuses.

- Je vais y réfléchir, finit-il par répondre.

Un sourire triste étira les lèvres de la jeune femme. Il venait de botter en touche avec sa facilité coutumière et elle sentit son cœur se serrer douloureusement. Il était temps de raccrocher avant de voir sa voix trahir ses sentiments.

- Très bien, lança-t-elle avec un entrain forcé. Je vais aller me baigner ! Bonne journée, Mon Colonel !

Ce ne fut qu’une fois prononcées, qu’elle réalisa la portée de ses paroles. Se baigner maintenant signifiait rejoindre l’inconnu que Jack avait entendu au téléphone. 

La réponse ne se fit pas attendre.

- … Amusez-vous bien, Carter.

Et il raccrocha.

Sam ferma les yeux et soupira douloureusement. En quelques secondes, elle venait de tout gâcher. Après cette petite scène, il était évident que jamais il ne la rappellerait.

 

***********************

 

Décidée de ne pas songer aux conséquences de leur discussion, Sam partit tôt le lendemain matin afin de visiter les ruines de Mycènes et manqua de se perdre tant les routes étaient mal indiquées. Comme elle s’y était plus ou moins attendue, elle passa la journée sans la moindre nouvelle de son supérieur. Elle tenta bien sûr de songer à autre chose. De profiter du site archéologique et de ses environs, mais elle gardait continuellement un poids mort au cœur.

Même si finalement, elle n’avait rien fait de mal – après tout, ils n’étaient pas ensemble - elle avait gâché ses propres vacances.

Sam rentra donc le soir, épuisée et mélancolique, et commanda un plateau repas dans sa chambre. Elle n’avait pas la moindre envie de croiser Mike.

Mais après une bonne nuit de sommeil, elle tenta de se secouer. De retour à la base, tout rentrerait dans l’ordre. Ce n’était pas la première fois qu’il y avait ce genre de malaise entre le Colonel et elle et cela n’avait jamais représenté un réel problème. Elle l’appellerait dans la journée.

Forte de cette résolution, Sam ouvrit les rideaux et sortit sur la petite terrasse individuelle de sa chambre afin d’admirer la mer. Son bungalow était à l’écart des autres, caché au milieu d’une végétation luxuriante et les deux chambres contiguës à la sienne n’étaient pour l’heure, pas encore habitées. En cette heure matinale, une petite brise tiède balayait les feuilles des arbres et Sam s’abreuva des couleurs lumineuses du paysage. 

Mais un bruit quelque peu grinçant et de mauvais augure se fit entendre sur sa gauche et la jeune femme jeta un œil morne vers les volets de la chambre voisine. Pendant la nuit, son bungalow s’était rempli et Sam soupira, déçue d’être dérangée dans sa contemplation solitaire.

Décidée à ignorer si possible l’importun, Carter garda les yeux dirigés vers le large tandis que la porte-fenêtre voisine s’ouvrait à son tour.

Un court silence se fit puis une voix retentit :

- Votre vue est plus belle que la mienne.

La stupéfaction la fit se tourner vivement vers le nouveau venu.

- Mon Colonel ! s’exclama-t-elle, les yeux écarquillés.
- Hello !

Interloquée, Sam observa son supérieur quelques secondes. Vêtu d’un long bermuda beige et d’un tee-shirt noir, Jack était appuyé contre la petite balustrade de bois de sa terrasse personnelle et souriait.

- Vous devriez fermer la bouche, Carter. Il y a beaucoup de mouches ici, j’ai cru remarquer… 

Un sourire sincère finit par détendre le visage de la jeune femme et elle secoua la tête, cherchant à faire taire les battements sourds de son coeur.

- Vous êtes arrivé quand ? demanda-t-elle pour la forme, afin de reprendre contenance.
- Cette nuit. Je sens que je vais avoir un gros problème avec le décalage horaire…
- Une sieste au soleil vous fera du bien.

Il acquiesça et les doigts de la jeune femme se resserrèrent autour du bois de la balustrade. Encore passablement stupéfaite, elle le regardait avec un émerveillement qu’elle avait du mal à cacher. Elle se sentait tellement heureuse de le voir ici, en face d’elle. C’était tout simplement surréaliste.

Le sourire de Jack s’accentua et elle retrouva ses esprits.

- … Alors… bredouilla-t-elle en se détournant un instant. Le Général Hammond a accepté de vous laisser partir ?
- Non, j’ai déserté, répliqua-t-il en lui lançant un clin d’œil.

Sam rougit d’embarras. Il dut avoir pitié d’elle car il enchaîna :

- Il a fini par dire oui afin de se débarrasser de moi après un harcèlement intempestif.
- J’imagine, acquiesça-t-elle en souriant.

Elle regarda alors autour de lui et rajouta :

- C’est incroyable que vous ayez eu une chambre dans le même bungalow que moi !
- J’ai su par Daniel dans lequel vous étiez. Mais hélas je dois le libérer dès ce soir. Apparemment, la majeure partie des gens arrive demain et un couple a réservé cette chambre.
- L’hôtel n’est pas complet au moins ?

Jack grimaça.

- C’est pas grave ! Je trouverais bien ailleurs !
- J’en doute en cette période de l’année…
- Bah ! Au pire, j’irai camper, ce ne sera pas la première fois, dit-il d’un air entendu.
- Ecoutez… C’est inutile, Mon Colonel ! Il y a deux lits d’une place dans ma chambre ! Vous n’avez qu’à dormir avec moi !

Le sourire amusé qu’elle reçut après cette tirade la fit rougir.

- Je veux dire…
- Je sais très bien ce que vous voulez dire, Carter. Mais je ne veux pas m’incruster.
- Vous ne vous incrustez pas ! C’est moi qui vous le propose !

Le cœur de Sam tambourinait si violemment dans sa poitrine qu’elle trouvait impensable qu’il ne l’entende pas. Son but, en l’invitant dans sa chambre n’était bien évidemment pas qu’il se passe quelque chose de particulier. Combien de fois avaient-ils partagé un lit en mission sans qu’aucun rapprochement ne se fasse ? Mais l’idée de passer ces quelques jours restant uniquement en compagnie du Colonel la remplissait d’allégresse.

Jack la sonda un bref instant afin de juger de sa sincérité, puis il finit par lui sourire.

- Très bien, merci beaucoup.

Le visage de Sam se fendit à son tour d’un sourire.

- Je suis contente que vous soyez là.

Le Colonel cilla légèrement face à cette franchise naturelle.

- Moi aussi…répondit-il, troublé.

 

 

******************************

 

Son assiette à la main, Sam jeta un œil derrière elle et observa un instant le dos du Colonel qui se tenait devant les viennoiseries. Elle n’arrivait toujours pas à croire à sa présence ici. L’excitation qui l’habitait ne faiblissait pas et elle multipliait ses efforts afin de garder un comportement relativement cohérent. De multiples questions tourbillonnaient dans sa tête.

Pourquoi était-il venu la rejoindre ?
Etait-il là en tant qu’ami ou bien y avait-il plus ?
Avait-il décidé de sauter le pas ?
Allait-il enfin se passer quelque chose, entre eux ?

Absorbée dans ses pensées, il fallut l’intervention d’une vieille femme pour la déloger du buffet charcuterie. Que faisait-elle là, d’ailleurs ? Elle n’était pas vraiment une adepte des tranches de lard en guise de petit déjeuner.

Elle grommela aussitôt puis rejoignit les viennoiseries.

Et si elle se faisait des idées ? S’il ne se passait rien du tout ?… Quelle déception. Non, elle ne devait surtout pas s’imaginer autre chose que quelques jours avec son supérieur et ami.

Inspirant profondément, elle rejoignit la table que Jack avait choisie, toujours face à la mer.

- Je vous ai commandé du café, dit-il tandis qu’elle s’asseyait.
- Merci.

Le Colonel entama son assiette avec appétit, jetant de fréquents coups d’œil vers le paysage qui s’offrait à ses yeux.

- Vous avez choisi le bon hôtel. C’est vraiment superbe, ici.
- Et tranquille. Dans la journée, il n’y a quasiment personne.

Jack engloutit son croissant.

- Ils préfèrent aller visiter les environs, hein ? Grand bien leur fasse ! dit-il tandis qu’un serveur leur apportait du café.

Sam s’écarta légèrement et son regard croisa celui de Mike assis à l’écart. Celui-ci l’observait avec surprise et elle se détourna, vaguement gênée. Lorsqu’elle leva les yeux vers son supérieur, celui-ci n’avait rien perdu de cet échange et dévisageait l’inconnu sans la moindre retenue. Mais il finit par se détourner et allongea ses longues jambes sous la table.

- Alors ? Vous avez vu quelques cailloux, hier ? demanda-t-il l’air de rien. J’espère que vous avez pris des photos sinon vous n’avez pas fini d’entendre s’égosiller le P’tit Scarabée.

Sam prit le temps de boire une gorgée de café avant de répondre.

Pourquoi se sentait-elle brusquement si coupable ? Elle n’avait rien fait de mal, après tout.

Mais elle fut soulagée de voir le Colonel garder sa bonne humeur et quelques minutes plus tard, elle avait oublié la présence de Mike plusieurs tables plus loin. Lorsqu’ils se levèrent d’un commun accord, la discussion portait sur les différentes activités de l’hôtel et Jack hésitait entre une sieste au bord de la mer, une sieste au bord de la piscine ou une sieste dans son lit.

Ils en débattaient encore lorsqu’ils passèrent à proximité de Mike. Un couple arriva alors en sens inverse et les contraignit à s’écarter afin de les laisser passer. Sam sentit la main du Colonel se poser au creux de ses reins et faillit en sursauter de surprise. D’ordinaire, il osait à peine un frôlement et soudainement, il se permettait de glisser une main sur sa hanche. Troublée, elle leva un visage rougissant vers lui mais il garda son regard tourné vers le couple qui leur libérait enfin le passage. Lorsqu’il la relâcha, Sam était encore si perturbée qu’elle en oublia de saluer Mike. Elle ne réalisa sa négligence que quelques minutes plus tard et sa confusion s’accentua.

Se pouvait-il que le geste du Colonel fut intentionnel ? Mais était-il seulement capable d’un tel comportement ? Après tout, elle ne l’avait jamais vu jaloux. Et elle ne savait pas du tout comment il pouvait se comporter avec une femme.

Dans un soupir, elle chassa les questions qui tourbillonnaient dans sa tête afin de se concentrer sur le présent. Et après avoir respectivement rejoint leurs chambres afin de se changer, Sam et Jack sortirent du bungalow, leurs serviettes de bain sur l’épaule.

La difficulté, pendant le court trajet jusqu’à la plage, fut de contraindre son regard à ne pas glisser plus bas que le visage du Colonel. Ce n’était pas la première fois qu’elle le voyait torse nu mais à chaque fois elle devait recourir à toute sa concentration afin de ne pas l’examiner de la tête aux pieds.

Lorsqu’ils arrivèrent aux abords de la plage, Jack haussa les sourcils. Seule une dizaine de parasols et de chaises longues les y attendaient.  

- Y a personne ?
- La plupart du temps, non, acquiesça-t-elle en souriant. Les enfants préfèrent la piscine aux galets donc ils sont de l’autre côté de l’hôtel.

Un soupir satisfait s’échappa des lèvres du Colonel mais il se transforma bientôt en bâillement.

- Ah… La fatigue me rattrape.
- Vous dormiriez sûrement mieux dans votre chambre, fit-elle remarquer en posant sa serviette de bain sur l’une des chaises longues.

Un silence se fit et Sam leva les yeux vers son supérieur. Celui-ci eut juste le temps de se détourner.

- Non, non, dit-il en se raclant la gorge. Je préfère profiter du soleil.

Il étendit à son tour sa serviette puis s’allongea sur le ventre sous le regard scrutateur de Sam.

- Vous devriez vous protéger, Monsieur, prévint-elle en sortant de son sac de plage une petite bouteille bleue.

Jack tourna mollement la tête vers elle puis s’affala de nouveau sur sa chaise.

- Je vais avoir du mal à tartiner mon dos, grommela-t-il. Ça vous ne dérangerait pas de… ?
- Non, acquiesça-t-elle aussitôt. Bien sûr que non.
- Merci Carter, soupira-t-il en fermant les yeux.

Prenant une profonde inspiration, Sam s’avança vers lui, le regard rivé à son dos. Sa peau était déjà naturellement hâlée mais leurs nombreux voyages en plein air lui avaient laissé une légère marque au niveau de la nuque et des bras. La bouteille dans la main, Sam s’assit à ses côtés et il se décala légèrement afin de lui accorder plus de place. Elle observa son visage détourné, ses yeux clos.

Sa mâchoire semblait étrangement tendue.

Elle reporta  bien vite son attention sur le dos de Jack et leva le spray au-dessus de lui, la main tremblante. L’idée que, dans quelques secondes, ses doigts allaient toucher sa peau la troublait profondément. Sa bouche était devenue sèche, son corps pris de frissons et son cœur au bord de l’explosion.

Inspirant profondément afin de se donner du courage, elle appuya plusieurs fois sur le spray puis reposa la bouteille et avança ses mains vacillantes. Mais lorsqu’elle toucha sa peau du bout des doigts, il ne broncha pas et Sam commença à étaler la crème.    

Un sourire se dessinant lentement sur ses lèvres, Carter fit glisser ses doigts sur la peau ferme du Colonel. Elle commença pas ses larges épaules, s’attarda sur sa nuque dégagée puis descendit peu à peu le long de sa colonne vertébrale. Ses mains massaient chaque parcelle de son corps avec une attention et un soin particulier, qui dénotait le plaisir qu’elle éprouvait à pouvoir enfin le toucher.

Lorsqu’elle rejoignit ses reins, elle remit un peu de crème et s’attela de nouveau à sa tâche. Un bref instant, le bout de ses doigts glissa sous l’élastique de son caleçon de bain et Sam sourit en voyant le souffle du Colonel se figer. Il était aussi troublé qu’elle et cela lui apporta la force de s’enhardir.

- Vos jambes, Mon Colonel. Je peux aussi m’en occuper, si vous voulez ?

Jack se racla de nouveau la gorge avant de répondre.

- Je ne veux pas vous embêter, Carter.
- Ça ne me pose aucun problème, s’empressa-t-elle d’affirmer.

Choisissant de garder les cuisses pour plus tard, elle commença par les chevilles et les mollets puis remonta peu à peu à hauteur des genoux. Elle ne cessait de jeter de fréquents coups d’œil sur le visage de son supérieur mais bien que celui-ci restait impassible, les jointures de ses mains étaient blanches à force de serrer les barres métallique de la chaise longue.

Tout laissait donc penser qu’il éprouvait autant de plaisir qu’elle à cette situation nouvelle.

Sam déglutit avec difficulté.

Si elle devait lui faire passer un message, c’était maintenant ou jamais. Aussi, le cœur à la limite d’exploser, elle s’attaqua enfin à ses cuisses fermes et musclées. Massant avec une lenteur délibérée, les mains de la jeune femme se murent sur sa peau et remontèrent de plus en plus haut jusqu’à atteindre la limite du caleçon. Là seulement elle hésita un court instant puis fit lentement glisser ses doigts par l’entrebâillement du vêtement.

Pour un œil extérieur, cela n’avait rien d’extravagant. Jamais elle ne se serait permis davantage que quelques millimètres mais pour deux personnes dont le moindre frôlement était à éviter, cela devenait plus qu’audacieux.

Un violent frisson traversa le corps immobile de Jack et Sam se mordit la lèvre. Elle aurait voulu continuer mais la peau du Colonel n’était plus graisseuse et la jeune femme pesta silencieusement contre ces nouvelles crèmes à application rapide. Si seulement elle avait su… elle en aurait acheté une beaucoup plus grasse.

Partagée entre un trouble évident et un brin de déception, elle finit donc par retirer ses mains et se releva. Elle n’avait plus assez d’emprise sur elle-même pour se permettre ne serait-ce qu’un « Et voilà, c’est fini ! », aussi rejoignit-elle sa chaise en silence. Elle s’allongea dessus et inspira profondément… puis se tourna vers Jack.

Celui-ci avait à présent les yeux grands ouverts et l’observait avec une intensité qui finit de lui ôter le reste de ses forces.

- Merci, dit-il finalement d’une voix sourde. C’était très…

« Agréable ? » songea-t-elle.

- … instructif, finit-il doucement.

Les joues de Sam se colorèrent violemment et un sourire apparut sur le visage de Jack. Mais quelques secondes plus tard, il fermait les yeux et la jeune femme soupira afin de calmer les battements de son cœur.

Il ne l’avait pas repoussée, ni remise à sa place. Elle venait de lui faire des avances et il n’avait pas dit non.

D’un autre côté, il n’avait pas dit oui.

Sam ferma à son tour les yeux, aussi tendue qu’un arc. Il fallait que les choses changent. Ils devaient enfin se rapprocher. Après tout, il n’était pas venu jusqu’ici pour rien, c’était impossible.

Décidée à se détendre coûte que coûte, Sam fouilla dans son sac et se saisit de son livre. Mais son trouble était tel qu’à la fin de chaque page, elle ne cessait de jeter un œil sur son supérieur afin de savoir s’il était ou non réveillé.

Deux heures plus tard, il dormait encore profondément et elle ouvrit leur parasol afin de les protéger du soleil devenu brûlant. Lorsqu’elle voulut se rasseoir, la jeune femme remarqua Mike, se dirigeant vers eux et elle lui sourit en mettant un doigt devant ses lèvres.

Celui-ci comprit aussitôt l’allusion et la rejoignit en silence. D’un bref coup d’œil, il jaugea l’homme endormi puis se tourna vers Sam.

- Alors finalement, vous n’êtes pas si seule que cela, murmura-t-il en souriant.
- Il m’a fait une surprise, répondit-elle, confuse.
- C’est votre compagnon ?

La jeune femme hésita. Comment le présenter ?

- Eh bien en fait… il est mon supérieur hiérarchique… et ami, rajouta-t-elle face à la mine surprise de Mike.
- Et futur compagnon ? insista-t-il.

Etant bien incapable de répondre à cette question, Sam se mura dans un silence prudent et l’homme acquiesça.

- Je vois, dit-il avec une note de déception dans la voix. Je vais me baigner. Si l’envie vous prend de me rejoindre…

Puis sans attendre une seconde de plus, il jeta sa serviette de bain sur l’une des chaises libres et rejoignit la mer. 
Sam soupira.

« Futur compagnon ». Si seulement.

Elle se tourna vers le Colonel, toujours assoupi et un sourire se dessina bientôt sur ses lèvres. Le voir ici avec elle, loin du SGC, loin du règlement et de leur devoir, rendait la situation surréaliste. En la rejoignant dans ce petit paradis, il avait fait une entorse à toutes les règles qu’ils avaient implicitement instaurées entre eux. Pas de tête à tête isolé. Aucun contact physique, hormis le minimum vital lors des missions. Aucun sous-entendu.

Le cœur de Sam s’emballa d’excitation.  

 

**************************

 
Les cris joyeux d’enfants réveillèrent le Colonel en sursaut et Sam sourit devant sa mine encore endormie. La serviette de bain avait laissé des plis sur sa joue droite et ses cheveux courts étaient plus ébouriffés que jamais.

Lorsqu’il avisa le lieu où il se trouvait, Jack laissa retomber sa tête comme une masse et soupira.

Sam le laissa émerger tranquillement puis le regarda se redresser en grognant.

- Quelle heure est-il ?
- Près de 13 heures.
- Vous avez mangé ?
- Non, je vous attendais. Mais je ne suis pas pressée.

S’étirant lentement, il se leva puis s’avança vers la mer. Et avant même qu’elle ait eu le temps d’émettre le moindre son, il plongeait dans l’eau turquoise.

- Il est fou ! s’exclama-t-elle aussitôt en se redressant, prête à le rejoindre aussi promptement que possible.

Avec cette chaleur, il risquait l’hydrocution.  

Mais dans la seconde suivante, le Colonel réapparut, s’ébrouant avec vigueur.

- Bordel ! cracha-t-il aussitôt. C’est quoi cette eau glacée ?

Sam rit et le regarda plonger de nouveau. Il nagea quelques minutes encore puis sortit finalement de l’eau, parfaitement réveillé. Elle tenta de garder son regard à hauteur du visage du Colonel mais cela représentait un véritable challenge. Elle plongea donc le nez dans son livre mais dut redresser la tête lorsqu’il s’arrêta à sa hauteur.

A croire qu’il le faisait exprès.

- Vous ne vous baignez pas ? demanda-t-il avec un sourire en coin.
- … Cet après-midi, je pense, dit-elle d’une voix enrouée.
- Ok !

Il lui tourna donc le dos et s’allongea sur sa chaise.

- Je me sèche et on va grignoter un truc ?
- Parfait.

Sam se tourna alors vers le large et inspira doucement. Le ciel était toujours aussi parfaitement bleu, la mer d’un calme olympien et une brise constante rendait la chaleur plus que supportable. On n’aurait pu espérer un temps plus favorable pour un séjour en Grèce.

- Vous voudriez aller visiter la région, Mon Colonel ?
- Aller voir des ruines ? Grand Dieu non ! Et puis j’ai prévu d’autres occupations.
- Lesquelles ? s’enquit-elle en se tournant vers lui avec curiosité.

Il lui jeta un regard énigmatique puis se détourna en souriant.

- Vous verrez bien…

La tension de Sam monta d’un cran mais elle tenta aussitôt de relativiser. Ces occupations en question n’étaient certainement pas destinées à avoir lieu au frais dans leur chambre… mais à l’extérieur.

Il parlait d’aller pêcher, bien évidemment.

 

***


 
La journée s’écoula tranquillement. Ils mangèrent sur le pouce au snack près de la piscine, puis retournèrent sur la plage avec quelques magazines en mains. Dormir, lire, nager. C’était une journée comme les aimait Jack O’Neill.

« Ca, ce sont de vraies vacances ! » ne cessait-il de répéter entre chaque… activité.

Dans le courant de l’après-midi, ils partirent nager ensemble et Sam se sentit troublée pendant toute la durée du bain. Le Colonel gardait ses distances mais elle envia les quelques couples présents dans l’eau et qui se chamaillaient gentiment. Elle aurait adoré pouvoir se montrer aussi familière avec lui. Mais l’idée de poser ne serait-ce qu’une main sur son épaule, uniquement dans le but innocent de le faire couler, lui semblait trop intime.

Dans la soirée, juste avant d’aller dîner, ils décidèrent de déplacer les affaires de Jack dans sa chambre et Sam resta silencieuse pendant toute la durée du transfert. Les deux lits d’une place étaient collés l’un à l’autre et elle se demanda un bref instant si elle ne devait pas proposer au Colonel de les éloigner… Mais après réflexion, elle n’en fit rien et il n’aborda pas le sujet.

Ils prirent une douche chacun leur tour, se changèrent - le port du pantalon étant obligatoire pour les hommes lors du dîner - puis partirent manger. Il y avait encore peu de monde au restaurant et ils eurent une place avec vue. Mais lorsqu’ils arrivèrent près de leur table, Sam sentit ses nerfs se tendre en découvrant Mike assis non loin d’eux.

Celui-ci se leva machinalement à son approche et la jeune femme fut contrainte de le saluer.

- Bonsoir, dit-elle, quelque peu embarrassée.
- Samantha.

Celle-ci rougit à l’appellation de son prénom qui lui sembla soudainement beaucoup trop familier. Elle jeta un œil sur le profil abrupt de Jack tandis que les deux hommes se serraient la main.

- Mon Colonel, je vous présente Mike. Mike, voici…

Mais elle s’interrompit sous le regard soudain rembruni de son supérieur.
Quelle idiote ! Pourquoi avait-elle utilisé son grade pour le présenter ?

- Jack O’Neill, finit celui-ci d’un hochement de tête.

La surprise se peignait à présent sur le visage de Mike et il redirigea son attention sur la jeune femme.

- « Mon Colonel » ? Vous travaillez pour l’armée ? Je croyais que vous étiez Astrophysicienne ?
- Eh bien en fait… Je suis les deux...

Sam vit du coin des yeux le Colonel s’agiter.

- Carter joue les modestes ! s’exclama-t-il en plongeant les mains dans les poches de son pantalon. En plus d’être Astrophysicienne, elle est Major dans l’Air Force et fait joujou avec des avions de chasse.
- Mon Colonel… bredouilla la jeune femme, embarrassée. 
- Eh bien quoi, Carter ? Y a pas de honte à avoir !
- Je n’ai pas honte !
- Je l’ai bien cru, l’espace d’un instant. En parlant d’espace, vous avez aussi oublié de lui signaler que vous vous étiez payé quelques petits voyages dans les étoiles !
- Mon Colonel ! s’exclama-t-elle aussitôt, s’attirant l’attention de quelques personnes attablées.
- Major ? répliqua celui-ci.

L’intonation était légère mais le regard glacé et Sam sentit son cœur se serrer.

Le Colonel O’Neill venait de remettre son second – elle en l’occurrence - à sa place.

Vacillant entre humiliation et colère, elle se tourna vers Mike. Celui-ci se racla la gorge, refroidi par l’ambiance.

- Bien… Je vais vous laisser. Bonne soirée.
- Merci, acquiesça Sam, un sourire crispé sur les lèvres. Vous aussi. 

Il les salua finalement de la tête puis rejoignit sa table. Dans un silence pesant, les deux militaires s’assirent à leur tour et Sam demanda, les dents serrées :

- Qu’est-ce qui vous a pris ?
- Mais rien ! se défendit-il aussitôt en s’adossant à sa chaise. C’est vous qui avez commencé avec ces histoires de grade, poursuivit-il plus sérieusement. Si vous voulez, on peut continuer… Major.

La jeune femme cilla et plongea le nez dans son assiette. Le Colonel soupira puis se releva brusquement.

- Je vais me chercher de quoi manger, grommela-t-il avant de s’éloigner en direction du buffet. 

Sam le regarda disparaître à l’intérieur du restaurant et contraignit ses mains à ne pas trembler lorsqu’elle se servit un verre d’eau. Elle but une longue gorgée et ignora sciemment le regard de Mike qu’elle savait posé sur elle.

Pourquoi diable avait-elle fait cela ?

« Mon Colonel, je vous présente Mike. »
« Mon Colonel… »

Elle reposa son verre avec brusquerie et soupira.

L’habitude.

Comment pouvait-il lui reprocher cinq longues années d’un quotidien fait de « Mon Colonel », « Major », « A vos ordres » ? Ce n’était pas facile de changer. Surtout qu’avant cet éclat, elle avait encore eu quelques doutes sur les raisons de sa présence ici, avec elle.

Alors certes, tous deux semblaient avoir choisi de changer leurs rapports, de donner à leur relation une nouvelle tournure. Mais comment aurait-elle pu deviner qu’il s’emporterait pour si peu ?

Sam s’adossa lourdement à sa chaise et leva les yeux vers la mer.

Non. Elle savait que la colère n’était pas responsable de sa réaction excessive. C’était la peur. La peur de la voir faire un pas en arrière. Encore. Il ne lui restait donc qu’une seule chose à faire. Le persuader que ce n’était en rien dans ses intentions.
Forte de cette décision, Sam reprit quelques couleurs et se leva à son tour.

Elle rejoignit le buffet à l’intérieur du restaurant mais prit bien soin de ne pas croiser le Colonel. Elle tenait à présenter ses excuses en bonne et due forme et non devant l’étalage des fromages et pâtisseries. Lorsque son assiette fut chargée, elle ressortit sur la terrasse et regagna sa place d’un pas incertain. Jack était déjà assis mais l’avait attendue avant de commencer.

Elle s’installa le plus posément possible puis redressa la tête afin de parler mais il fut plus rapide :  

- Ecoutez… Je suis désolé, je n’aurais jamais dû vous parler ainsi. Je vous présente mes excuses. 

Peu dupe de son air nonchalant, Sam sourit aussitôt. Jack O’Neill ne s’excusait que très rarement.  

- C’est moi qui suis désolée, répondit-elle. Les habitudes sont difficiles à… mettre de côté.
- Ma réaction était d’autant plus ridicule… et vraiment grossière.  

Le Colonel se permit un geste dépité de la fourchette et la jeune femme haussa les épaules, amusée malgré elle. Elle avait plus que l’habitude de son caractère irascible et changeant, et aimait sa façon bien à lui de se faire pardonner.

Le strict minimum, certes. Mais il était sincère.

- N’en parlons plus, dit-elle. C’est déjà oublié.
- Mmmffff, grommela-t-il, passablement soulagé. Pour la peine, vous pouvez me raconter votre visite de ruines de je-sais-plus-où en détails, je ne broncherai pas.

Le sourire de Sam s’accentua.

- Vous êtes sûr ? Il y a de la matière pour un livre entier.

Jack cilla légèrement mais d’un geste calme et assuré, il prit sa fourchette et répondit :

- Je suis tout ouïe.

Elle lui raconta donc sa visite de Mycènes et prit un malin plaisir à s’appesantir sur de nombreux détails. Il l’écoutait cependant avec un air si intéressé qu’au bout de plusieurs minutes elle lança, entre deux bouchées :

- J’ai presque l’impression que vous m’écoutez d’une oreille attentive.
- Mais c’est le cas ! s’exclama-t-il aussitôt avec une fausse indignation.
- Pourtant ce n’est guère le genre de discussion qui vous passionne d’habitude, rit-elle doucement.

Il haussa les épaules, un sourire en coin.

- Vous avez toujours eu la faculté de rendre vos récits beaucoup plus intéressants que ceux de Daniel.

Perplexe un instant, Sam sentit ses joues rosir violemment sous son regard dénué d’ambiguïté.

Il lui faisait des avances. Jack O’Neill lui faisait des avances.

Dans la forme, ce n’était guère la première fois qu’il se permettait ce genre de compliment, mais d’habitude le Colonel y mettait toujours une pointe d’humour ou de dérision afin de contrebalancer ses propos.

Mais pas aujourd’hui.

Croisant son regard, ils se sourirent timidement puis reprirent la discussion sur un ton plus léger. Le jour déclinait peu à peu, le restaurant se désemplissait mais Sam en avait à peine conscience. Pour la première fois qu’elle le connaissait, le Colonel se permettait quelques confidences sur son passé, son enfance et la jeune femme sentait son cœur battre de plus en plus vite.

Enfin. Enfin, elle rentrait dans son monde. Enfin, il la laissait entrevoir ce qu’il y avait derrière ce mur qu’elle avait cru infranchissable. Ils devenaient intimes.

Peu à peu, pas à pas… Elle apprenait.

Sam fut donc plus que déçue lorsqu’on leur fit comprendre que le restaurant comptait fermer ses portes. Il n’était que vingt trois heures mais d’autres établissements ouvraient au sein du complexe hôtelier : boîte de nuit, bar, etc. Ils choisirent pourtant de rejoindre tranquillement leur bungalow en suivant le bord de mer.  

 

 

L’air était agréable et la lumière tamisée des lanternes disséminées sur le chemin pavé rendait l’atmosphère plus que romantique. Un silence tendu s’était fait et Sam entendait son cœur raisonner jusque dans ses oreilles. Plus que jamais, elle ressentait la présence du Colonel à ses côtés. Sa main si proche de la sienne.

Que ferait-il si elle tentait soudainement de lier ses doigts aux siens ? Aurait-il la même idée qu’elle ?

Et s’il l’embrassait ?

Rouge de confusion, Sam secoua discrètement la tête.

Quel âge avait-elle au juste ? Pourquoi attendait-elle ? S’il s’était s’agit d’un tout autre homme que le Colonel, elle n’aurait pas patienté une minute de plus pour tenter sa chance. Mais « il » n’était pas n’importe quel homme. Et il ne l’avait jamais été.

Ils arrivèrent finalement devant la porte de leur bungalow sans que Sam n’ait finalement esquissé le moindre geste et elle observa le visage serein du Colonel tandis qu’elle allumait la lumière de leur chambre.

Une pointe d’agacement naquit en elle.

Avait-elle donc été la seule à spéculer pendant leur balade au clair de lune ? La seule à s’être fait des films pendant que lui savourait simplement la tranquillité du moment ? A le voir si naturel, il ne semblait pas enclin à accélérer les choses dès ce soir, aussi soupira-t-elle et le calme revint peu à peu l’envahir.

Malgré l’intimité de la situation, la routine leur épargna tout embarras lors de leurs préparatifs et lorsque Sam rejoignit la chambre après un passage dans la salle de bain, Jack était déjà dans son lit, seulement vêtu d’un caleçon. Il avait pudiquement ramené le drap sur lui mais avait sorti l’une de ses jambes afin de combattre la tiédeur de l’air.

Elle n’avait quant à elle guère eu le choix sur sa tenue puisqu’elle n’avait pas prévu de passer la nuit en compagnie d’un homme. Le débardeur- short réglementaire kaki fut examiné avec amusement et Sam rougit en rejoignant son lit.

- Vous n’êtes jamais vraiment en vacances, vous ! lança-t-il.
- C’est ce que j’ai de plus confortable pour dormir en milieu aride, rétorqua-t-elle en se glissant sous les draps.

Le Colonel émit un rire léger.

- « En milieu aride ». Vous êtes dans un hôtel, Carter. Pas au beau milieu d’un désert sur P3X-machin-chose.

Sam rougit de plus belle et préféra clore le sujet en se saisissant de la télécommande de la télé.

Dommage qu’il n’ait pas porté un caleçon ridicule, elle aurait pu se moquer un peu. Au lieu de cela, elle ne voyait que la quantité indécente de peau qui attirait désespérément son regard.

Difficile de rester concentrée.

- Vous… vous voulez regarder la télévision ? demanda-t-elle.
- Pas vraiment non, répondit-il tranquillement.
- Vous voulez peut-être lire ?
- Non plus.

Sam sentit l’embarras revenir au galop et reposa la télécommande d’une main tremblante. Un silence diablement gênant s’était instauré et, n’en supportant davantage, la jeune femme finit par lancer :

- Eh bien bonne nuit, Mon Colonel.

Et elle éteignit la lumière.

Soulagée d’avoir l’obscurité pour cacher son trouble, Sam s’allongea sur le dos, les mains sagement ramenées sur le ventre… puis attendit.

Il allait forcément tenter quelque chose. Après tout ce qui s’était passé aujourd’hui, après les sous-entendus de cet après-midi… il n’allait pas rater cette chance.

- Bonne nuit, Carter.

La voix posée du Colonel retentit un court instant dans le silence et Sam écarquilla les yeux, estomaquée.

Il n’allait rien faire. Ils étaient tous les deux dans la même chambre, à quelques centimètres l’un de l’autre, à des milliers de kilomètres du SGC… et il n’allait rien faire ?

Furieuse et dépitée, Sam se redressa, donna un violent coup de poing à son oreiller puis tourna le dos au Colonel.

- Qu’a fait ce pauvre oreiller pour mériter un tel traitement ? demanda Jack, une note d’humour dans la voix.
- Rien du tout, répondit-elle sèchement. J’ai chaud.

Elle entendit son supérieur bouger légèrement afin d’appuyer sur le bouton contrôlant la climatisation et l’air de la chambre se rafraîchit doucement.

- Merci, grommela-t-elle.

Puis elle se tut, bien décidée à calmer la colère qui l’avait envahie. Elle n’avait aucune envie de ruminer toute la nuit.

Mais…

- Carter ?
- … Quoi ? glapit-elle.

Un bruissement se fit dans son dos et elle sursauta en entendant Jack murmurer de nouveau son nom à l’oreille.

- Carter ?

Le cœur battant furieusement dans sa poitrine, elle déglutit avec effort puis parvint à souffler à son tour :

- … Oui ?
- Je crois que j’ai choppé des coups de soleil…

Il fallut à Sam quelques secondes pour donner un sens à ces propos tant elle était troublée, et elle se redressa.

- Oh ! fit-elle tandis qu’il s’écartait. Montrez ?

Elle tâtonna à la rechercher du bouton de la lampe de chevet puis alluma. Il était assis devant elle, le drap cachant à peine son caleçon.

- Où ça ? demanda-t-elle, le regard fuyant.

Il se tourna aussitôt et Sam avisa la teinte écrevisse qu’avait prise sa peau.

- Vous n’auriez pas dû vous exposer dans l’après-midi, Mon Colonel, dit-elle, les sourcils froncés.
- J’avais espéré que vous me remettiez un peu de crème mais vous m’avez royalement ignoré, répondit-il, un sourire en coin.

La jeune femme rougit quelque peu.

- Vous auriez dû demander ! Attendez.  

Elle se leva et partit chercher le baume apaisant qu’elle avait prudemment acheté à son arrivée en Grèce. Lorsqu’elle revint, il l’observa de son regard indéchiffrable et elle ordonna, mal à l’aise :

- Tournez-vous.

Il s’exécuta sans broncher et elle entreprit d’étaler la crème sur le dos large et rouge avec le plus de délicatesse possible. Voyant ses muscles se tendre sous ses doigts, elle opéra avec le plus de précaution possible, sans le moindre geste ambigu.

- Vous faites cela mieux que personne, Carter, soupira-t-il au bout d’un instant.

Elle sourit malgré elle puis se redressa.

- Voilà.
- Merci.

Tandis qu’elle posait le baume sur la table de chevet, il se rallongea sur le dos et croisa ses mains sous sa nuque. Elle se tourna alors vers lui et se figea devant son air satisfait.

- Vous êtes sûr que ça vous fait mal… ? s’enquit-elle avec un soudain scepticisme.
- Je suis à l’agonie. Ça ne se voit pas ?

Le sourire du Colonel s’accentua et Sam leva les yeux au ciel.

- Vous vous servez de ma bonne volonté ! se récria-t-elle avec agacement.
- Juste un peu… Mais j’ai quand même préféré la séance de ce matin.

La jeune femme sentit son pouls s’accélérer dangereusement et baissa les yeux un bref instant.

C’était une ouverture. Cela avait tout d’une ouverture. Qu’était-elle supposée faire à présent ? Que devait-elle dire ? Quel comportement devait-elle adopter ?

Les joues brûlantes d’énervement, elle leva les yeux vers lui, toujours si calme, si stoïque. Son regard ne la quittait plus et son sourire en coin la paralysa.

- Carter… murmura-t-il alors. Qu’est-ce que vous voulez ?
- Ce… Ce que je veux ? bredouilla-t-elle avec effort.

Il resta silencieux et les yeux de Sam dérivèrent involontairement sur son torse nu, avant de revenir vivement se poser sur son visage. Le sourire de Jack s’élargit.

- … Ce que je veux…. répéta-t-elle sans parvenir à dire autre chose.

Son trouble fut complet lorsqu’il se redressa lentement afin de s’asseoir, le visage à quelques centimètres seulement du sien.

- Qu’est-ce que vous voulez, Carter… ?  

Le regard de la jeune femme se posa sur les lèvres du Colonel, si proche. Trop proche pour respirer. Elle étouffait.

La climatisation continuait de brasser l’air devenu trop froid mais Sam n’avait plus conscience que de la chaleur que dégageait ce corps si près du sien. Elle devenait aveugle à tout ce qui n’était pas lui. Son visage aux traits abrupts, la rudesse de sa mâchoire, la courbe sensuelle de sa bouche…

Ce qu’elle voulait ?

Ce qu’elle voulait…

Des baisers.

Des baisers et des caresses. Elle voulait des gémissements, de la sueur, une explosion de plaisir ! Ses mains puissantes sur elle, sa voix rauque à son oreille, son long corps contre le sien !

« … vous pouvez toujours prendre la sortie 12 afin de contourner l’accident. N’oubliez pas que Weston Street est encore fermée pour des travaux et ce jusqu’à jeudi. Quant au carrefour Beauty, il faudra prendre votre mal en patience… pour encore deux semaines. Voilà ! C’est la fin de ce point… »

- Raahhh ! grommela Sam en tendant la main afin d’éteindre son radio-réveil d’un geste brusque.

Elle arrivait au meilleur moment de ce fichu rêve !

Dans un soupir agacé, la jeune femme ouvrit les yeux, jeta un œil machinal sur l’heure qu’affichait l’engin diabolique puis se leva d’un bon.

15h10. Il était grand temps pour elle de partir.  

Bien qu’elle ne se soit pas assoupie pendant cette courte sieste, elle se sentait suffisamment reposée pour la journée interminable qui s’annonçait. Jetant un vague regard à son reflet dans le petit miroir trônant au dessus du lavabo, elle passa une main excitée dans ses cheveux puis enfila sa veste de cuir et se planta devant sa table de chevet.

Ses quartiers au SGC ne contenaient que peu d’objets personnels hormis les quelques photos représentant sa famille mais son regard s’arrêta sur la brochure en papier glacé. Sa main tremblante caressa le prospectus et Sam dut fermer les yeux un instant afin de refouler la soudaine peur panique qui l’envahissait.

- On respire, murmura-t-elle pour se donner du courage. Et on y va !

D’un air résolu, la jeune femme se saisit de la brochure, prit son sac de cuir et posa celui-ci sur son épaule avant de sortir précipitamment de ses appartements.

Le couloir de la base était désert et elle humecta ses lèvres devenues sèches. Les talons souples de ses tennis grinçaient légèrement sur le sol d’une propreté toute militaire et elle concentra ses pensées sur ce son régulier. Lorsqu’elle parvint à l’un des carrefours, Sam hésita encore une fraction de seconde puis s’engouffra dans le couloir de droite.

Sa main trembla de plus belle et elle crispa ses doigts devenus désagréablement humides sur le papier glacé.

La porte était là. Au fond de ce couloir gris.

Plus que quelques pas.

Voilà.

 

*********************************

 

Jack sortit du bureau du Général Hammond avec un soupir de lassitude mêlé d’une bonne dose de soulagement. La To’kra avait eu la bonne idée d’arriver à la base quelques heures avant leur semaine de congés et il avait craint de voir celle-ci annulée…

« SG3 et SG11 feront parfaitement l’affaire ! »

C’était du moins ce que Jack n’avait cessé de répéter au Général… qui s’était finalement laissé convaincre.

Encore une chance d’ailleurs puisque l’un des membres de leur équipe, Carter en l’occurrence, était déjà partie.  

D’un geste mécontent, le Colonel fit claquer le dossier qu’il tenait dans la main contre sa cuisse puis répondit du bout des lèvres au salut d’un Lieutenant.

En Grèce ! Pourquoi diable allait-elle s’enterrer là-bas ? Y allait-elle avec un homme ? Pourquoi avait-il encore été le dernier à être mis au courant ? S’il n’avait pas déboulé dans son bureau la veille de ces vacances afin de lui proposer – sans trop y croire – une virée dans le Minnesota, jamais il ne l’aurait su.

Il devait vraiment perdre cette manie. Cela en devenait ridicule.

Au début pourtant, il était sincère… puis c’était devenu un jeu entre eux. Il demandait, elle refusait et ce en lui donnant des excuses de plus en plus abracadabrantes. Mais la Grèce ? Ca, c’était vraiment le pompon !

Si elle voulait mettre de la distance entre eux, elle avait choisi le bon moyen.

Tout était à présent très clair.

De méchante humeur et le moral au plus bas, Jack rejoignit ses quartiers et ouvrit la porte. Il fit un pas dans la pièce et son pied glissa soudainement, manquant de le faire tomber à la renverse.

- Bordel ! s’exclama-t-il aussitôt en se rattrapant au chambranle de la porte.

Se rétablissant sur ses deux pieds, il baissa la tête et découvrit l’objet du délit. Une sorte de prospectus avait été glissé sous sa porte et trônait sur le seuil de sa chambre. Se penchant d’un geste agacé, Jack s’en saisit et s’apprêtait à le froisser de la main lorsqu’un mot attira son attention.

« Grèce »

Haussant les sourcils, il ferma la porte de ses quartiers, jeta le dossier qu’il tenait toujours sur son lit puis observa la brochure de plus près. Un ciel d’un bleu turquoise, une mer d’un calme parfait et un hôtel tout confort… Il soupira puis déplia le prospectus…

… et son cœur s’arrêta soudain.

Sur la page du milieu, écrit au feutre noir d’une écriture fine et parfaitement reconnaissable, un court message était noté :

« Si ça vous dit, rejoignez-moi. »

 

FIN

 

Voilà... Désolée, c'est pas vraiment ma meilleure fic mais j'ai pondu ça dans ma tête sous le soleil de Grèce... lol J'espère au moins vous avoir un peu dépaysé. Promis, la prochaine fic SG sera plus originale! ;-)

 

Une p'tite review?

 

 


La Malerune* : A lire absolument ! ^^